La fin du XIXe siècle voit un développement inédit de la pratique musicale et des concerts, lié à l’essor de la bourgeoisie qui s’affirme comme principale “consommatrice“ des activités culturelles. Les peintres s’adaptent aux habitudes de cette nouvelle clientèle et les tableaux à thème musical se multiplient : femmes au piano, scènes de café-concert, etc. Catherine Aubriot, spécialiste des relations entre peinture et musique, présente les contingences historiques, techniques et économiques qui expliquent cet engouement des peintres pour la musique et analyse la perception de la société par les artistes selon leur style et leur vécu.
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1- De 1848 à 1918, une extraordinaire dynamique sociétale et artistique
Catherine Aubriot brosse le portrait d’une période de l’Histoire particulièrement riche sur le plan artistique et sociétal : des bouleversements politiques, sociaux et économiques (révolution industrielle, urbanisation, etc.) ont rencontré des innovations majeures dans le domaine de l’image et du son (invention de la photographie, du cinéma, etc.). Au gré de ces évolutions, la peinture et la musique sont devenus d’authentiques « témoins de la société », les artistes ayant su en capter les beautés comme les cruautés.
2- Autour du piano
Le piano est l’instrument qui a été le plus représenté par les peintres du XIXe siècle, dans des tableaux décrivant des univers très différents les uns des autres : des ambiances feutrées et sereines des leçons de piano représentées par Renoir aux peintures tristes ou graves de Cézanne (L’ouverture de Tannhauser) en passant par les scènes de famille de vie familale de Matisse, Catherine Aubriot fait découvrir les multiples représentations de cet instrument au coeur de la musique du XIXe.
3- Chant, corde, vents et percussions
A côté du piano, les peintres du XIXe siècle se sont attachés à représenter, quoique moins souvent, les univers de musiciens – confirmés ou apprentis – jouant des cordes, des vents et des percussions. Même le chant, qui semblait devoir ne pas se prêter à de la représentation picturale pour des raisons de convenance, a fait l’objet de peintures magnifiques… Catherine Aubriot commente des oeuvres de Degas, Corot ou encore du Douanier Rousseau qui, connues ou moins connues, nous emmènent dans des univers riches en émotion.
4- Musique des riches, musique des pauvres
Les clivages sociaux qui traversent le XIXe siècle se retrouvent dans les peintures qui traitent de sujets musicaux.
Quoi de commun entre les peintures de Manet représentant des enfants mendiants jouant pour gagner quelques sous et celles de Bonnard et d’autres offrant au regard des salles de concert luxueuses et des salons privés ? Rien, si ce n’est le génie des peintres qui reproduisent ces univers par la magie de leur talent.
5- La musique rêvée
De nombreux peintres ont recréé, par la force de leurs oeuvres, des univers oniriques emplis de muses et de symboles, dans lequel la musique tient une place primordiale. Catherine Aubriot commente quelques-unes de ces peintures majeures qui donnent de la musique une vision souvent idéalisée, toujours rêvée, représentant le plus souvent des instruments à cordes, telles que harpes, lyres, ou encore cithares. Des œuvres telles que celles de George Frédéric Watts (l’Espérance) ou bien encore d’Ingres, s’inscrivent dans cette mouvance.
6- Cabarets et cafés-concerts, humour et caricatures
A l’inverse de ces univers oniriques, de nombreux peintres ont su représenter l’énergie, parfois la violence de certaines scènes de musique se déroulant dans des lieux bien éloignés des imaginaires précédents. Cabarets et cafés-concerts ont été peints avec prédilection par des artistes comme Degas et Toulouse-Lautrec. Catherine Aubriot conclut son exposé en commentant quelques-unes des affiches et peintures les plus célèbres de ce dernier : Au moulin rouge (1892) ou encore Moulin rouge – La Goulue (1891).