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L’art contemporain, faut-il s’en méfier ?
1. Introduction
Faut-il se méfier de l’art contemporain ? Sans doute, estime Delphine Deshayes, qui plaide cependant d’emblée pour une prise de risque de la part du spectateur, invité à partir à la rencontre d’oeuvres qui, pour être surprenantes et parfois dérangeantes, lui permettent d’explorer de nouveaux aspects du monde et de lui-même qu’il ne connaissait pas. L’art contemporain n’est « ni un style, ni un courant », mais un univers que Delphine Deshayes propose d’explorer à partir d’une série d’oeuvres très récentes présentées à l’abbaye de Maubuisson.
2. Un art ésotérique ?
La première cause de méfiance relevée par Delphine Deshayes est que, pour de nombreux spectateurs, comprendre l’art contemporain supposerait de leur part des connaissances préalables. Or, il n’est pas toujours besoin d’avoir des connaissances pour apprécier une oeuvre. Delphine Deshayes fait observer que cela a toujours été le cas. Elle prend l’exemple des oeuvres de Giuseppe Arcimboldo qui, au-delà de leurs aspects figuratifs compréhensibles de tous, cachaient des références et des allusions politiques. Dans le même esprit, Delphine Deshayes présente des oeuvres exposées à l’abbaye de Maubuisson.
3. Des oeuvres trop « faciles à faire » ?
L’autre raison de la méfiance manifestée par les spectateurs à l’égard de l’art contemporain vient de ce qu’ils ont parfois l’impression que les oeuvres sont si simples qu’il n’est pas besoin d’être artiste pour les réaliser. Mais Delphine Deshayes souligne qu’être un artiste n’est pas, à titre principal, une personne qui maîtrise une technique, picturale ou autre, c’est avant tout une personne douée d’une créativité exceptionnelle. Elle prend l’exemple d’une oeuvre d’Emmanuelle Villard, orcherstrant le travail de céramistes sans elle-même les réaliser.
4. Des oeuvres partout ?
Delphine Deshayes revient ensuite sur une autre raison qui semble expliquer la méfiance à l’égard de l’art contemporain : sa présence hors des lieux classiques d’exposition, comme les musées. Mais Delphine Deshayes explique, à la lumière notamment du Cosmoball de Malik Ohanian et du Banc Rouge de Christophe Nourrisson, que la présence d’oeuvres dans des espaces non conventionnels peut favoriser la rencontre entre une oeuvre et le spectateur.
5. « Ce n’est pas beau »
Delphine Deshayes explique que les spectateurs qu’elle rencontre considèrent souvent qu’une oeuvre d’art doit être belle. Elle rappelle cependant que le Beau, notion très difficile à définir, relève avant tout du goût propre à chaque personne.
Mieux, certaines oeuvres d’art contemporain utilisent le Beau et le détournent, piégeant le spectateur à ses propres attentes. Delphine Deshayes cite notamment l’exemple d’une oeuvre d’Orlan, Différences et Répétitions, en première approche séduisante mais stigmatisant en réalité l’artificialité des défilés de mode.
6. Des oeuvres provocatrices et onéreuses ?
La méfiance témoignée à l’égard de l’art contemporain vient aussi du fait que les artistes font souvent preuve de « provocation gratuite », selon certains spectateurs. Au contraire, Delphine Deshayes explique que, s’il y a provocation, elle vise toujours un objectif, à l’instar de La courbe de la ritournelle, oeuvre de Jan Kopp réalisée à partir de centaines de baguettes de pain, représentation dérangeante de notre société du gâchis. Autre critique souvent entendue : le prix des oeuvres. Mais Delphine Deshayes explique que ce coût est raisonnable et surtout est justifié par le travail des différents acteurs impliqués dans la réalisation d’une oeuvre.